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Le cas Ménard

Par Olivier Perceval

Robert Ménard met les pieds dans le plat, mieux que ça : il saute à pieds joints dans la soupière et s’agite dans les médias, lesquels ne le trouvent finalement pas si antipathique que ça, pour mieux éclabousser ses anciens amis.

« La semaine dernière, Robert Ménard faisait son mea culpa sur les migrants (il a déclaré avoir « honte» de ce qu’il avait pu dire au sujet des Syriens ou des Irakiens fuyant la guerre). Une séquence vivement critiquée par Marion Maréchal, qui a estimé que Robert Ménard devrait « dire ça aux morts et aux mutilés à vie, victimes du Bataclan » visés par des migrants islamistes. « C’est minable, juste minable. J’allais ajouter un mot plus dur, c’est dégueulasse », a jugé Robert Ménard, visiblement remonté, qui a poursuivi : « que Marion Maréchal ne se prenne pas pour une espèce de géopoliticienne de plateau de télévision et qu’elle aille voir un petit peu ce que c’est que le malheur des gens » nous rapporte CNews. Nous pouvons nous étonner que celui qui suppliait les uns et les autres de ne pas tenir de propos outranciers en vue d’une réconciliation future use de tels propos ! Nous pouvons également nous interroger sur le rôle possible « d’idiot utile » que lui feraient jouer les tenants d’un deuxième tour Macron/Le Pen …

Il se trouve qu’à l’Action Française nous connaissons bien Marion Maréchal et Robert Ménard, ce dernier ayant même été reçu dans nos locaux pour présenter son livre. Il a fait un tabac.

On peut supposer que le maire de Béziers qui se situe aujourd’hui à la curieuse confluence de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron, est victime d’une espèce de juvénile et naïve crise de conscience qu’il prend sincèrement pour de l’honnêteté mais qui n’est rien d’autre qu’une succession de réactions épidermiques, commandées par un sentimentalisme dominant dans la pensée du siècle, ce qui en fait un jouet idéal pour les tristes sires qui l’environnent avec leur morgue et leur cynisme. Mais je m’en voudrais de jouer « les petits mufles réalistes », si justement dénoncés par Bernanos, pour m’en tenir uniquement à cette explication.

Il y a chez ce personnage qui aime authentiquement « les gens », un réel agacement justifié pour cet autre camp du bien, qu’on appelle les « natios » et dont le comportement est en effet parfois aussi horripilant que celui de la gauche bien-pensante et moralisatrice. Une pensée souvent binaire et exclusive, mais qui ne s’applique pas à Marion Maréchal. Nous avons accueilli à Paris Marion Maréchal il y a quelques années dans le cadre d’un congrès royaliste. Nous avons pu mesurer à quel point son raisonnement est cohérent et sérieux et avons nourri l’espoir qu’un jour elle inclinerait, comme le firent d’autres grands cadres historiques de l’AF à l’époque de Maurras, pour le nationalisme intégral, c’est-à-dire en réalité, le seul nationalisme qui pousse la logique jusqu’à son terme et qui aboutit au retour de l’Etat royal.

Bref, nous apprécions beaucoup Marion Maréchal qui est restée en lien avec quelques-uns de nos amis, mais nous ne nous interdisons pas de nous en démarquer si nécessaire : l’AF n’est pas un parti de godillots mais un mouvement composé de militants et de militantes qui ont appris à penser par eux-mêmes. Ils sont donc capables à tout moment de laisser s’exprimer leur esprit critique.

S’agissant de Robert Ménard, Gabrielle Cluzel, rédactrice en chef de Boulevard Voltaire, qui prend bien soin de proclamer son indépendance (« S’il fait partie de l’histoire de Boulevard Voltaire, Robert Ménard n’a plus aucun lien opérationnel avec la rédaction, ni formel, ni informel ») et le connait fort bien pour avoir travaillé avec lui, est celle qui peut en parler le mieux :

« Je dirais simplement qu’il n’est pas homme de calcul. Je crois donc Robert Ménard pleinement sincère, il fait simplement partie de ces hommes affectifs à sincérités successives qui expriment sans fard ce qu’ils pensent au moment où ils le pensent, au gré de ce qu’ils ressentent. Je rajouterais, par ailleurs, qu’il est un pragmatique. Qui aime agir et se retrousser les manches, et ne peut supporter de rester trop longtemps dans le camp de ceux qui, faute d’être aux affaires, doivent se contenter de brasser des idées et de critiquer ; bref, le camp de l’opposition. »

Quant à nous, sur la question de l’Ukraine, comme sur la question de la sécurité des frontières que ce soit pour les migrants et les réfugiés, nous déplorons comme Marion le manque de rigueur de nos administrations et le tropisme atlantiste de la plupart de nos édiles.

Robert Ménard est assurément un bon maire, mais est-il un visionnaire politique au sens régalien ?