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Manifestation du mouvement des gilets jaunes, à Belfort, le 01 décembre 2018.

Réflexions d’un gilet jaune sur nos institutions

Nous avons reçu ce message d’un « gilet jaune et blanc », récemment diffusé sur les réseaux sociaux. Il montre que les institutions de la monarchie traditionnelle répondent aux attentes des « gilets jaunes » et plus généralement des Français, même lorsqu’ils n’en sont pas conscients.

Voilà longtemps qu’en France la protestation contre l’abus d’impôts est à l’origine des révolutions. Pour l’avoir oublié et n’avoir ni mesuré, ni compris le malaise des Français, Emmanuel Macron est aujourd’hui confronté à une insurrection. Sa renonciation à la hausse des taxes et l’annonce qu’il a faite de quelques mesures bien ciblées mais uniquement financières viennent trop tard. Sa réponse est déjà dépassée car la colère du peuple français exprime aujourd’hui, plus profondément, un rejet des prétendues élites qui ont conduit à la situation actuelle, dirigeants politiques, partis et syndicats mêlés, et pose désormais explicitement la question des institutions.
Les gilets jaunes viennent de milieux sociaux et professionnels variés et la plupart d’entre eux n’ont pas d’opinions politiques définies ; mais rien n’interdit d’en avoir. Gilet jaune parmi les autres, il me paraît qu’une monarchie restaurée répondrait à un certain nombre des attentes qu’ils formulent aujourd’hui.

Les Français ne font plus confiance aux partis politiques

Or, la monarchie traditionnelle s’oppose à la division des Français en partis. Au contraire, le roi, incarnant l’unité nationale, se place au-dessus des factions. Pour donner la parole au vrai peuple sans que les partis confisquent à leur profit la représentation nationale, il ne serait même pas besoin de créer une nouvelle institution, il suffirait d’en réaménager une qui existe déjà : le Conseil économique et social, créé par le général De Gaulle à une époque où le fondateur de la Ve République envisageait, lui aussi, d’échapper au carcan partisan. Cette institution, qui ne peut jouer aucun rôle véritable tant que les partis continuent à contrôler la vie politique française, s’est rapidement transformée en une « assiette au beurre » qui sert aux gouvernements à récompenser leurs clients politiques et à subventionner des syndicalistes.
Mais dans un autre contexte politique, la composition du Conseil économique et social, où siègent des délégués élus des associations familiales, des salariés, des chefs d’entreprises, des professions libérales, des artisans, des agriculteurs et du secteur associatif, autrement dit du corps social, serait beaucoup plus représentative du pays réel que ne l’est aujourd’hui l’Assemblée nationale, qui fait la part belle aux partis politiques et aux professionnels de la politique. Les représentants des 36 000 maires de France et des collectivités territoriales pourraient également y siéger, si le Sénat n’était pas maintenu dans ce nouveau cadre institutionnel. Ce Conseil économique et social rénové pourrait utilement conseiller le roi et collaborer avec lui à l’élaboration des lois, à la place de l’Assemblée nationale.

Les Français rejettent le mondialisme et marquent leur attachement à la nation

Si Emmanuel Macron et son ministre de l’Intérieur avaient espéré que les Gilets jaunes piétineraient la flamme du soldat inconnu sous l’arc de Triomphe le 24 novembre, c’était raté : les manifestants ont chanté la Marseillaise agenouillés devant la tombe. Cette marque de patriotisme a manifesté l’attachement des Français à leur nation, par contraste avec la pauvreté des célébrations du centième anniversaire du 11 novembre. Aux yeux de l’actuel président de la République, en effet, l’identité de la France et son histoire doivent s’effacer devant la construction d’une Europe supranationale et les nécessités de la mondialisation. L’adhésion au pacte mondial des nations unies sur les migrations, entériné à Marrakech par le secrétaire d’État aux Affaires étrangères au nom du gouvernement français et d’Emmanuel Macron, en pleine crise des Gilets jaunes, a encore souligné ce divorce entre le président et le peuple.
Sans tourner le dos à l’Europe – les monarchies européennes sont aussi une affaire de familles –, le roi de France serait au contraire garant de la souveraineté et de l’identité françaises, ainsi que de l’intérêt national qui se confond avec celui de la dynastie. En outre, le caractère traditionnellement chrétien de la monarchie française, en rappelant la primauté du christianisme dans l’histoire et la civilisation françaises, tout en respectant une conception ouverte de la laïcité et la liberté religieuse des Français non croyants ou de confessions différentes, apporterait une réponse au problème posé par l’installation récente d’une forte communauté musulmane dans notre pays.

Les Français rejettent le parisianisme et souhaitent que la « France des périphéries » soit reconnue

La monarchie est par essence décentralisatrice. Ayant construit la France, bien avant 1789, elle est la mieux placé pour respecter la nature profonde de notre pays. Il faut revenir sur le découpage des régions aberrant auquel ont procédé les socialistes sous François Hollande (dont Emmanuel Macron était le ministre de l’Économie) et revenir aux provinces historiques basées sur les réalités géographiques locales et régionales. Contrairement à ce que prétendait Eric Besson, le ministre de l’Identité nationale de Nicolas Sarkozy, la France n’est pas « un agrégat de peuples désunis », mais une fédération de peuples réunis au fil des siècles par l’intelligence politique des rois de France et qui constituent une nation à la forte cohésion. Ce sont la cohésion et la continuité de l’État républicain qui ne sont garanties que par l’Administration, dont les agents sont inamovibles. C’est pourquoi la République est essentiellement jacobine.
Les Conseils économiques et sociaux régionaux, composés sur le même modèle que le CES national, pourraient devenir les outils qui permettraient de restaurer les franchises et libertés des provinces de France, en les dotant de vrais pouvoirs de décision politique. Ceci permettrait aux représentants élus du « peuple réel » d’incarner cette France des territoires abandonnée par les élites parisiennes depuis des années, et ignorée des radars médiatiques. La première mission de ces conseils pourrait être de faire des propositions pour rééquilibrer le développement de notre pays en tournant le dos au concept du « tout pour les métropoles ».

Les Français refusent de confier la défense de leurs intérêts aux syndicats institutionnels et aspirent à ce que soient suscités des corps intermédiaires qui les représentent vraiment

Les corps intermédiaires : communautés naturelles ou de destin : familles, collectivités locales, organisations professionnelles, associations, chambres de métier ou d’agriculture, etc., font écran entre l’État et les personnes et protègent les libertés publiques. Leur libre développement doit être encouragé en conséquence et ne plus être freiné par des réglementations tatillonnes.
Les Gilets jaunes ont clairement refusé d’être représentés par les syndicats institutionnels, auxquels ils ne font pas plus confiance qu’aux partis politiques.
En France, 11 % des actifs seulement sont syndiqués, contre 23 % en moyenne dans l’Union européenne. En outre, l’appartenance à un syndicat est beaucoup plus forte dans le secteur public, dont les salariés bénéficient de la sécurité de l’emploi, que dans le privé, qui n’en bénéficie pas. Les Français ont compris que les organisations professionnelles marchent la main dans la main avec l’État, qui décide de leur représentativité et les subventionne largement. Or, qui paie commande ! Le nécessaire rétablissement d’un authentique syndicalisme en France, privilégiant l’intérêt commun autour de l’entreprise et la recherche de la justice sociale, suppose qu’il soit libéré de cette tutelle effective de l’État et se mette au service des salariés, à commencer par ceux du secteur privé. Ce n’est qu’à cette condition que les syndicats retrouveront la confiance des Français.

Les Français veulent pouvoir vivre de leur travail. Ils ne demandent pas davantage d’« État-Providence », mais plus de justice sociale

La formule de Georges Pompidou, « Arrêtez d’emmerder les Français », est plus actuelle que jamais. Interdictions, surveillance, réglementations exaspérantes et taxes s’accumulent et rendent la vie quotidienne de la population française de plus en plus difficile. Les petites et moyennes entreprises n’y échappent pas, souvent accablées sous le poids des normes nationales et européennes. Nos compatriotes ont le sentiment que leurs libertés sont bridées, et leur revenu confisqué pour remplir le tonneau des Danaïdes étatique. Les classes moyennes, en particulier, sentent leur niveau de vie se dégrader et le fameux « ascenseur social » est en panne. L’État-Providence, qui vit depuis des années à crédit (mais pour combien de temps ?), multiplie également les impôts et les taxes (la France est championne du monde des prélèvements obligatoires) et promet comme toujours des aides aux plus démunis, censées servir de paratonnerre à la colère qui monte.
Mais les Français ont compris que cette « Providence » n’est providentielle qu’avec l’argent qu’elle leur prend et qu’elle leur prendra de plus en plus car le taux de l’argent va un jour remonter et qu’il faudra bien aussi commencer à rembourser nos créanciers. Ils ne demandent pas davantage d’assistanat, mais de pouvoir jouir normalement des fruits de leur travail. C’est la vraie justice sociale, dont l’État doit être le garant, sans prétendre l’organiser à la place des Français. Elle s’oppose à l’injustice qui consiste à essorer la classe moyenne, tout en consentant des libéralités aux très riches, pour nourrir le Moloch étatique, qui dévore les richesses créées par les Français sans pour autant cesser de creuser le déficit et la dette publics.
La figure populaire du roi saint Louis reste le plus beau symbole de justice sociale dans notre histoire.

Hervé Bizien