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Traquer les fraudeurs grâce aux réseaux sociaux ou l’extension continue de la surveillance

FIGAROVOX.- Le ministre de l’Action et des Comptes publics a annoncé que les contrôleurs du fisc pourront désormais consulter les réseaux sociaux pour traquer d’éventuelles fraudes de la part des contribuables. N’est-on pas déjà suffisamment fiché par l’administration?

Gaspard KOENIG.- La tartufferie est totale: l’État qui d’un côté jure de protéger notre vie privée contre les GAFA ne cesse d’y pénétrer par tous les moyens. Dans le think-tank que j’ai fondé, GenerationLibre, nous nous battons contre l’extension continue de la surveillance. Nous avions déposé sans succès un mémoire au Conseil constitutionnel contre la loi renseignement qui autorise le filtrage, par des algorithmes classés secret-défense, des métadonnées de l’ensemble de la population. Depuis deux ans, nous avons engagé un recours en excès de pouvoir contre le fichier TES qui accélère le fichage biométrique des citoyens français (après le rejet récent du Conseil d’État, nous portons notre recours devant les juridictions européennes). L’initiative récente du ministre du Budget ne me surprend donc pas. Pourquoi refuse-t-on de retenir la leçon de Montesquieu: le pouvoir ne se limite jamais par lui-même? Les outils technologiques lui donnent aujourd’hui des moyens de contrôle sans précédent: pourquoi s’en priverait-il? Mais le plus comique, en un sens, s’agissant des réseaux sociaux, c’est que nous nous faisons nous-mêmes les acteurs de notre propre surveillance. Exactement ce que redoutait Foucault, à savoir l’avènement d’un «réseau de dispositifs qui seraient partout et toujours en éveil, parcourant la société sans lacune ni interruption».