Le caricatural Philippe Poutou aura vendu la mèche dans sa candeur et un mauvais français : « Nous, on pense qu’y faut désarmer les flics. Comme ça, personne aura envie de leur tirer dessus. » La France, et une bonne partie du monde occidental, contient toujours parmi elle quelques dizaines de milliers de militants d’extrême gauche, parfois renommés d’ultra-gauche pour les rendre plus sympathiques, qui ont juré de détruire cette civilisation en général. Dans l’idée, et si l’on n’y regarde pas de près, pourquoi pas ? Cette civilisation s’est tellement effondrée sur elle-même, au point qu’elle ne mérite peut-être plus ce nom, qu’il y a sans doute peu de choses en elle à conserver. Seulement, nous tenons qu’il y a longtemps eu dans l’homme et dans son histoire des choses à aimer et à conserver et que c’est au contraire lorsqu’il a été décidé de ne plus rien conserver que l’histoire s’est enkystée dans une répétition narcissique d’elle-même.
Philippe Poutou n’est guère intéressant. Ceux qui sont derrière lui le sont un peu plus. Ceux qui se baptisent « antifas » ou « anarchistes » – quand bien même ils n’ont aucun autre fasciste qu’eux-mêmes à combattre, ni aucune pensée anarchiste à bâtir – et chez qui la dénonciation de la domination et l’apologie de l’émancipation ne sont jamais que des prétextes à déchaîner leur violence. Les punks avaient au moins la décence de ne pas prétendre à un monde nouveau. Ceux-ci, dont l’on trouve les textes fondateurs chez les habitants de Tarnac – qu’en passant, nous avions défendu lorsqu’ils avaient été incarcérés pour tentative de déraillement de TGV, parce que la manipulation politique paraissait trop grosse, et d’ailleurs de façon purement gratuite, sûrs que nous étions qu’à leur habitude ils nous cracheraient à la gueule en retour, mais ce n’est pas important – des textes donc édités à La Fabrique, et signés d’un Comité invisible, qui ne l’est qu’à lui-même tant chacun en connaît les rédacteurs, ceux-ci ont juré de tout casser, ni par amitié ni par colère, seulement parce qu’ils sont persuadés que l’histoire ne passera que par le médiocre entonnoir de la violence et de la destruction.
Leurs grands faits d’arme, on les lit dans une interview qu’ils ont donnée au Monde, le journal du très prolétaire Pierre Bergé, par où se mesure la collusion anthropologique de la gauche de salon et de l’extrême gauche de campagne et de rue. Leur dernier acte de naissance, ce sont les manifestations contre la loi El Khomri, il y a un an. Ils les résument ainsi : « Depuis plusieurs mois, il ne s’est pas passé deux semaines sans que des affrontements n’éclatent aux quatre coins du pays, pour Théo, contre la police ou tel ou tel meeting du FN. » L’originalité du combat éclate. Quand on leur demande pourquoi on ne les a pas vus, en bonne logique, attaquer des meetings de Macron, on n’obtient qu’un abstrus silence en réponse.
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