Pour le baiser coupable d’une sainte, j’accepterais la peste comme une bénédiction »
(Emil Cioran, Des larmes et des saints).
« Toutes les choses recommencent comme elles ont commencé » (Joseph de Maistre, Examen de la philosophie de Bacon, chap. XIX).
Si, comme moi, vous n’êtes pas né « dans » une religion ni ne vous êtes encore converti à aucune, il vous est peut-être arrivé de vous demander : « Où est le sacré pour moi ? » Dans la beauté des œuvres d’art ? Dans le sentiment du tragique ? Dans l’innocence des enfants ? L’évêque Eusèbe de Césarée racontait que quand son maître Origène était bébé, son père découvrit sa poitrine et s’exclama : « L’esprit de Dieu est là. » Ô chers enfants ! En contemplant les miens, je songe ainsi exactement.
Dans quelle tradition s’inscrire quand, comme tant d’autres sous nos latitudes « démythologisées » (Rudolf Bultmann), les aïeux n’ont légué qu’un agnosticisme amorphe, qu’une sorte de vide de Dieu ? Pour les plus anarchistes d’entre eux, la religion n’était, je le sais, qu’un vaste mensonge. Pour les autres, de petites piétés discrètes, un peu honteuses, les animaient peut-être encore, parfois. De toute façon, l’oubli les a emportées. Mes parents furent encore baptisés, par convenance ; je ne le fus pas : de convenance il n’y avait même plus.
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