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L’Action Française à la veille de Mai 68, une « vieille dame » fatiguée ?

Quand on pense à Mai 68, on pense rarement aux royalistes, même si, dans quelques articles (1) et livres (2) récents, ils sont évoqués, furtivement, et souvent comme de simples opposants anti-gaullistes au mouvement contestataire de Mai. Pourtant, leur rôle mérite d’être souligné et leurs idées, plutôt non-conformistes pour une certaine frange de ceux-ci, ne sont pas ridicules, loin de là, à la fois dans l’analyse et dans la réponse à Mai 68, à ses espérances comme à ses illusions, parfois totalitaires pour quelques unes. Se replonger dans les archives de l’Action Française est, à cet égard, extrêmement instructif et, même, enrichissant.

Mais, quand surgit Mai 68, que sont les royalistes ? Quels sont leurs moyens d’expression, leur corpus idéologique, leur visibilité ? En fait, au printemps 1968, le royalisme, c’est d’abord et presque exclusivement l’Action Française, du moins dans les kiosques, les facultés, les esprits. Malgré les choix politiquement dévastateurs faits par le maître d’icelle, Charles Maurras, durant une guerre qu’il avait pourtant bien et tristement prévue, et que ses compagnons de combat Bainville (dès le 14 novembre 1918, dans son fameux article « Demain » publié dans l’A.F. quotidienne) et Daudet (le terrible article du 1er février 1933, si juste, si prophétique) avaient eux aussi annoncée et dénoncée, et malgré le discrédit de l’après-guerre, le mouvement maurrassien a resurgi, sans doute plus faiblement qu’auparavant, et a refondé une presse nationale, certes de moindre influence que du temps du quotidien (1908-1944), mais qui s’affiche dans les kiosques et se crie dans les rues des grandes villes : Aspects de la France, hebdomadaire dirigé par Pierre Pujo, le fils d’un des fondateurs de la première A.F. ; mais aussi Amitiés Françaises Universitaires, lancé en 1955 et devenu au milieu des années 60 AF-Université, adressé au public lycéen et étudiant ; sans oublier quelques bulletins locaux ou catégoriels, comme L’Avenir Français, qui traite des questions sociales, ou L’Ordre Provençal, bulletin de l’Union Royaliste Provençale… Les chiffres de vente restent modestes, mais tout de même significatifs, et Aspects est régulièrement cité dans les revues de presse, et toujours bien lu au Palais-Bourbon.

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