L’Action française s’impose
Après la mort du comte de Chambord en 1883, le royalisme s’était peu à peu réduit à lui-même. Il disposait encore d’une presse moins puissante mais combattive. En revanche si sa force parlementaire déclinait, ses liens avec le catholicisme social étaient très forts. Avec la mort du chef de la Maison de France, Philippe VII, arrive Philippe VIII, le duc d’Orléans. Le mouvement de la « Jeunesse royaliste » (JR) échoue dans une tentative de coup de force en 1899 et ses responsables s’exilent pour échapper à la Haute-Cour. Maurras lance alorsl’Enquête sur la monarchie et l’Action française va s’imposer.
La « Jeunesse royaliste » s’est fondue, depuis la Haute-Cour, au sein des Comités départementaux traditionnels. L’activité est grande dans tous les domaines : « Librairie nationale », « Congrès monarchiques de presse et de propagande », « Étudiants royalistes », « Dames royalistes », « Action royaliste populaire » encadrant des « groupes ouvriers » et travaillant avec l’« Avant-garde royaliste » (fondée en 1901 par Firmin Bacconnier), nombre de cercles et d’œuvres divers. Que de bonnes volontés ! Que d’efforts ! Il faut lutter contre le manque de capitaux, l’isolement, la concurrence des ralliés de I’ «Action libérale », la tentation de l’apolitisme, particulièrement nette dans la presse provinciale où trop souvent on ne crie « Vive le Roi » que le dimanche.
L’Action française « royalisée » et formée en ligue à partir de janvier 1905, s’impose en trois années et, dès 1907, éclipse toutes les autres organisations traditionnelles ; elle constitue des groupes parallèles aux formations anciennes qui, pour la plupart, se vident et s’assoupissent, mais certaines résistent à l’emprise. La presse en place pâtit aussi du succès rapide, à partir de 1908, du nouveau quotidien. Conscients du génie maurrassien, et du dynamisme des néophytes qu’il a convertis, les anciens cadres royalistes sont d’abord reconnaissants mais s’inquiètent aussi de la démarche positiviste de Maurras et des thèses biopolitiques de Bourget. Maurras répond qu’il ne faut pas opposer ce qui peut être composé : la propagande d’idée et de doctrine et la propagande de sentiment. Tout le monde s’accorde sur la nécessité de royaliser les esprits et, d’abord, de convertir les nationalistes afin de pouvoir exploiter efficacement une nouvelle affaire Dreyfus ; il s’agit d’élargir au maximum l’opération qui vient d’être réussie au sein de l’Action française. Quels chefs seraient mieux qualifiés pour mener cette entreprise que ceux de cette même Action française ?