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President Joe Biden receives a briefing on COVID-19 on Friday, July 16, 2021, in the Oval Office of the White House. (Official White House Photo by Adam Schultz)

Anthony Fauci – fin de partie ?

Par Peter Bannister

La semaine dernière, Washington DC a vu des échanges féroces entre Anthony Fauci, conseiller en chef pour la santé publique auprès de la Maison Blanche, et les sénateurs républicains Rand Paul et Roger Marshall (que Fauci a qualifié de « crétin »). Ces clashs ont eu lieu à la suite de deux développements majeurs dans l’enquête sur la gestion de la pandémie et sur la question de savoir si Fauci a menti sous serment quant au soutien américain de recherches sur le « gain de fonction » menées à l’Institut de Virologie de Wuhan.

D’abord, Project Veritas (PV) a publié des documents militaires américains montrant qu’en 2018, une division du Département de la Défense avait rejeté comme trop dangereux un projet de l’EcoHealth Alliance (EHA) de Peter Daszak proposant de modifier des coronavirus de chauves-souris en Chine afin de développer un vaccin. Le travail de l’EHA a pourtant été soutenu par la suite par l’Institut National des allergies et maladies infectieuses (NIAID) du Dr Fauci ainsi que par l’Institut National de la Santé (NIH) dirigé par Francis Collins. Parmi la documentation de PV se trouve un rapport du Major Joseph Murphy (13 août 2021) de la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA), alléguant que le SARS-CoV2 serait le fruit d’une tentative bâclée d’inoculer les chauves-souris, fustigeant également les autorités pour leur politique vaccinale et leur désapprobation des traitements précoces contre le covid.

Dans un second développement, les républicains américains ont pu accéder au texte intégral (non-édité) des échanges par e-mail de Collins et Fauci avec d’autres spécialistes en février 2020. Ces courriels montrent que certains scientifiques avaient alors pris la possibilité d’une fuite du SARS-CoV2 d’un laboratoire très au sérieux – hypothèse balayée ensuite comme « complotiste » par l’establishment scientifique.

Sentant que ces dernières révélations pourraient le compromettre, les détracteurs de Fauci (cible principal des critiques, Collins n’étant plus en activité) au Sénat et au Congrès américain ont exigé des explications du gouvernement sur la gestion de la pandémie. Mais quel est le poids réel de la documentation elle-même ?

Àvrai dire, celle fournie par PV a une portée assez limitée. La thèse de Joseph Murphy sur l’origine du SARS-CoV2 est certes intrigante, mais il s’agit d’une lettre personnelle plutôt qu’un rapport officiel du DARPA, et ses avis au sujet des traitements précoces et la dangerosité des vaccins ne sont que des opinions privées.

Le refus par le DARPA du projet de l’EHA reste néanmoins important dans la mesure où il montre que ces recherches étaient officiellement jugées dangereuses, appartenant à la catégorie « gain de fonction » (objet d’un moratoire américain entre 2014 et 2017). Ici, PV ne fait que confirmer les travaux d’autres chercheurs, la proposition de l’EHA ayant déjà été publiée par The Intercept en septembre 2021, ainsi qu’une lettre (révélée par le groupe DRASTIC et citée par le journaliste Paul Thacker) spécifiant les raisons pour son rejet. Comme le note Ryan Grim de l’Intercept dans une analyse assez équilibrée, il semblerait que Murphy aurait été le lanceur d’alerte qui avait contacté DRASTIC.

Répondant aux interrogations de Roger Marshall, l’affirmation de Fauci que son propre département n’a jamais vu le projet de l’EHA n’est pas nécessairement mensongère, car il s’agissait d’une candidature adressée à DARPA plutôt qu’à NIAID. Par contre, les protestations de Fauci sonnent assez creux quand on considère que le NIAID et le NIH ont engagé 3,7 millions de dollars en 2019 pour six ans de recherches menées par l’EHA, y compris des études de gain de fonction (selon un article de Newsweek d’avril 2020 publié juste après l’annulation du projet par le NIH).

Les échanges d’e-mails entre Fauci, Collins et leurs collaborateurs en février 2020 sont par contre réellement explosifs, démontrant que l’idée de la fuite du SRAS-CoV2 d’un laboratoire n’était pas de tout fantasque pour des scientifiques de premier plan. Il est également frappant de voir la justification proposée par Collins (citant l’image de la « science » et de « l’harmonie internationale ») pour détourner l’attention du public de l’hypothèse d’une origine du SARS-CoV2 au laboratoire. Ici on peut légitimement questionner la probité intellectuelle et la hiérarchie de valeurs des autorités sanitaires, semblant prioriser les relations publiques et la défense des institutions scientifiques et politiques au coût de la quête de la vérité et du bien commun. Hiérarchisation qu’on percevra également dans les efforts de Collins et Fauci, plus tard en 2020, de discréditer les épidémiologistes « marginaux » Jay Battacharya (Stanford), Martin Kulldorff (Harvard) et Sunetra Gupta (Oxford) pour avoir signé la déclaration de Great Barrington critiquant l’implémentation généralisée de stratégies de confinement. En paraphrasant Orwell, on pourrait dire que, pour les décideurs, tous les scientifiques sont égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres.