You are currently viewing Zemmour et Macron : même combat ?

Zemmour et Macron : même combat ?

Par Charles Saint-Prot

Essayiste, notamment auteur de L’État-nation face à l’Europe des tribus aux éditions du Cerf

Tribune libre

L’Action Française est un espace de débat et c’est la raison pour laquelle nous publions ce brûlot contre Eric Zemmour de notre ami Charles Saint-Prot. D’aucun trouveront injustes, exagérées voire inexactes certaines des accusations contenues dans ce texte. Mais au sein du mouvement monarchiste, ont toujours existé les controverses, notamment sur les questions d’actualité politique. Il est probable qu’une réponse sera apportée dans un prochain article, car aujourd’hui, l’attitude de l’AF est d’observer avec intérêt ce phénomène des présidentielles qui semblent voir un réveil des partisans de l’indépendance nationale qui ne trouvent pas d’issues dans les vieux partis préexistants. Pour autant, sur la question de l’Islam, la question n’est pas de juger une religion, mais de mesurer son impact sur une société sécularisée dont la religion fondatrice est devenue honteuse et repentante. Si le trop plein d’Islam nous menace, c’est surtout à cause de l’absence de France. (NDLR)

M. Zemmour se qualifie volontiers de néo-conservateur, on ne voit pas pourquoi il ne s’affirme pas tout simplement conservateur (« un mot qui commence mal » disait Philippe d’Orléans, prétendant au trône de France, vers 1900). Sans doute cède-t-il à la détestable manie de travestir les mots pour se dissimuler, comme de prétendus esprits subtils tentent d’expliquer que le terme de nationalisme serait « démodé », trop connoté avec une époque révolue, bref « politiquement incorrect », il faudrait plutôt parler de « souverainisme » ou on ne sait quoi. En suivant cette démarche assez lâche, on pourrait aussi remplacer le mot de nation par celui de communauté et le mot État par celui de prestataire de services.

En vérité le conservatisme est le vieux réflexe petit-bourgeois de ceux qui n’aiment pas le peuple et veulent un système ultralibéral ne protégeant que leurs intérêts particuliers. Bien entendu les partisans de Zemmour adhèrent à toutes les billevesées à la  mode. Voici ressurgir le mythe de l’unité des droites, celui de la destruction de l’État confondu avec une bureaucratie tatillonne qui est précisément le contraire de l’État juste au service du bien commun et , bien sûr, la politique d’hostilité à l’Islam oubliant la magnifique leçon de François 1er allié du Sultan ottoman. Il faut le dire et le répéter le problème est l’immigration pas l’Islam.

Les partisans de Zemmour adhèrent à la financiarisation de l’économie et trouvent très subtil leur idole qui prétend ne pouvoir « ouvrir tous les chantiers à la fois » parce qu’il veut surtout mener son combat contre les musulmans du monde entier plutôt que s’occuper de l’économie au sujet de laquelle il affirme que « ce ne  sera pas la révolution » (Marianne du 10 au 16 septembre 2021) , ce qui signifie qu’il se soucie des petits comme d’une guigne.

On remarquera également que ce soi-disant défenseur de la France ne dit rien de la nécessaire sortie de notre nation d’une Otan qui n’est que le bras armé de l’hégémonisme américain. Il se tait sur les innombrables abandons de souveraineté commis par le régime (le dernier en date étant l’incroyable mise à mort du « cloud souverain » au profit des GAFAM, les cinq grandes firmes américaines dominant le marché du numérique). Zemmour est désespérément muet sur la nécessité impérieuse de quitter l’Union européenne, machin au service de l’impérialisme allemand ; de recouvrer notre souveraineté juridique ou de sortir de l’euro. Il y a pourtant une imposture à se prétendre à la fois  gaulliste et européiste (comme Barnier), comme si on peut être à la fois nationaliste et anti-français, gaulliste et pétainiste, bonapartiste et monarchiste…

De fait, tout le programme de M Zemmour se réduit à une haine obsessionnelle  de l’Islam. Pour le reste, il est l’homme des grandes banques. Jonathan Nader son conseiller financier est passé chez Rothschild avant d’être chez Morgan .  Julien Madar qui s’occupe de lever des fonds est aussi un ancien de la banque Rothschild. Tous ont connu Macron dans cet antre de la « finance anonyme et vagabonde ». Un ancien publicitaire macroniste, Frank Tapiro, soutient maintenant Zemmour « sans avoir rompu avec Macron » Et, c’est encore un ancien dirigeant des « jeunes avec Macron », Nicolas Zysermann qui est trésorier de l’association des Amis de Zemmour.

 Comme l’écrit Jérôme Sainte-Marie dans le quotidien L’Opinion du 30 septembre 2021  la présence de Zemmour renforce Emmanuel Macron. Il éloigne de Marine Le Pen l’électorat de Fillon et la droite de l’argent ; celle de la bourgeoisie égoïste la plus bête de monde, nostalgique d’Adolphe Thiers, le massacreur de la Commune et chantre de cette république bourgeoise et  conservatrice  ne respectant que les intérêts des possédants, qui déclarait le 13 novembre 1872 devant les députés : « La République sera conservatrice ou ne sera pas »