You are currently viewing Rideau !

Rideau !

Par Christian Rol*

Nous apprenons la fin prévisible de celui qui fut une espèce de condottière du libéralisme sauvage, il eut été flibustier ou boucanier, s’eut été Barberousse plutôt que Jean Bart, tant il était connu pour être impitoyable. Mais il apparaissait régulièrement dans les médias, à la façon d’un feuilleton, dans des affaires flamboyantes où l’argent coulait à flot et où il avait un sens inné pour se mettre en scène, (car il était aussi cabotin à ses heures) et grâce à lui beaucoup de petites gens se retrouvèrent sans boulot.Mais aujourd’hui, celui qui fit briller magistralement l’OM garde une place dans le cœur de ces chômeurs, c’est ainsi. Christian Rol qui a une plume agile nous offre cet hommage posthume (NDLR),

La mort de Tapie ne m’inspire rien d’autre qu’une douce indifférence. Je l’ai haï comme j’ai détesté tous ces socialos qui ont mis le populo et les racailles dans leur poche pour vivre peinards dans des hôtels particuliers et rouler dans des limos avec chauffeur.

Avec le temps, j’ai hiérarchisé mes haines… Tapie était un escroc dans tous les domaines. Il était de ces primates qui pensent qu’il y a les « baiseurs » et les « baisés », que la fin justifie les moyens et que la politique, les affaires ou le foot, ne sont que des moyens pour se la couler douce. Bref, le type était un sale type, mais pas plus qu’un Fabius, un Kouchner, un Michel Noir et tant d’autres.

Un soir, tandis que j’étais au Crazy Horse avec ma poupée, il arrive accompagné de son épouse, simplement, sans tambours ni trompettes. C’était après son Age d’Or et ses frasques des années 80-90. Et les voilà qui s’attablent proches de nous, discrets comme un couple de la classe moyenne venu pour siroter un Champ’ de basse extraction et reluquer les filles sexy en train de se dessaper…

Je l’ai un peu observé et n’ai rien ressenti de ce que l’homme public m’inspirait. Il faut dire qu’il n’était ni hâbleur ni frimeur, et, surtout, son épouse semblait si heureuse de s’extraire, ne serait-ce qu’un soir, de cette vie ponctuée de juges, d’huissiers, de flics et de fisc.

Je crois que c’est elle qui m’a attendri ce soir-là. Elle l’avait choisi alors qu’elle était encore une jeune fille. Malgré toutes les avanies, et parvenue à l’âge où l’on souhaiterait la sérénité d’un foyer, fut-il modeste, elle lui tenait encore la main…

*Ecrivain