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Crise énergétique en Europe : comment en sortir ?

Par Ludovic Lavaucelle (LSDJ)

Le retour d’une forte inflation, avec notamment la montée du prix des carburants, annonce une récession imminente en Europe. Doit-on en imputer la faute à la série de crises que les pays ont dû affronter ? Ou bien devons-nous pointer d’abord du doigt des errements stratégiques européens ? Pour prendre un peu de recul, Freddie Sayers d’Unherd a interrogé Louis-Vincent Gave, directeur de Gavkal Financial Research (interview en lien ci-dessous).

Un réveil brutal pour les pays occidentaux après 20 ans de croissance mondiale grâce à une énergie abondante (01’32’’ à 04’). Entre 2000 et 2011, la Chine a multiplié sa production de charbon par 7. L’économie mondiale a donc été poussée par cet afflux d’énergie très bon marché avant que la pollution engendrée ne force Pékin à limiter l’activité de ses centrales à charbon. On pouvait attendre une résurgence de l’inflation. Il n’en a rien été grâce au schiste américain qui a garanti une nouvelle décennie d’énergie peu coûteuse. Les É.U. sont passés de 5,5 millions à 13 millions de barils de pétrole par jour. Ils ont doublé leur production de gaz simultanément… Mais le « miracle » du schiste n’a pas duré, par manque d’investissement alors que les coûts de production augmentaient. Dans ce contexte, les pays européens, déjà gravement affaiblis par les mesures « anti-Covid », ont fait le choix de mener la guerre sur deux fronts : écologique contre les énergies fossiles, puis financier contre la Russie.

L’impact économique des sanctions contre la Russie (04’ à 15’). L’une des premières mesures de rétorsion décidées par l’U.E. a été la dénonciation des accords-cadres de fourniture d’énergie russe. Mais les industriels européens continuent d’en acheter. Ils l’achètent juste plus cher ! Cette situation crée une lourde incertitude pour les entreprises qui vont chercher à couvrir leurs risques en réduisant leur activité, et en augmentant leurs prix. Les Occidentaux ont voulu transformer le système financier mondial – qu’ils dominent – comme arme pour « ruiner la Russie ». On allait détruire la valeur de la monnaie russe, le rouble. On en est loin ! Le rouble a atteint des sommets alors que l’euro est au plus bas. Les Russes ont contre-attaqué en exigeant que tout achat d’énergie se fasse en roubles. Certes, le système financier fondé sur le rouble ne pèse pas lourd. Mais puisque les Européens ont toujours besoin de gaz naturel russe et qu’ils doivent le payer en roubles – qui coûtent de plus en plus cher – l’impact financier est réel. Ajoutons que la France, le Royaume-Uni ou les É.U. affichent des taux d’endettement abyssaux… Faiblesse dont ne souffre pas la Russie qui reste le deuxième producteur d’énergie au monde, juste après les États-Unis.

L’impact géostratégique : un cadeau fait à la Chine (15’ à 19’45’’). Les pays occidentaux ont concentré leurs efforts ces dernières années pour contenir l’expansion chinoise. Une faiblesse de la Chine est son manque de matières premières à l’inverse des États-Unis. L’Occident profitait jusqu’à présent du « coup » majeur de la diplomatie américaine, il y a près de 50 ans, qui avait réussi à séparer Russes et Chinois. Or on vient de jeter par la fenêtre ce qui a garanti une certaine hégémonie occidentale en mariant Russes et Chinois. Ces derniers vont trouver les matières premières chez leur voisin et leur vendre les produits de consommation qui ne sont plus importés d’Occident. La Chine va devenir une place financière de premier plan en utilisant la Russie comme une sorte de colonie produisant l’énergie dont elle a besoin, et en attirant vers elle les pays émergents qui ont massivement refusé de s’associer aux sanctions.

La stratégie énergétique de l’U.E. aggrave la situation (19’47’’ à 28’). La volonté politique de lutter contre le réchauffement climatique en « décarbonant » l’énergie a eu pour corollaire de désinvestir dans la recherche et l’exploitation de nouvelles ressources fossiles et de concentrer les efforts dans le solaire et l’éolien. Les énergies carbonées représentaient 86% des besoins mondiaux en 2000. 20 ans après, elles en représentent… 84%. On a même tourné le dos au nucléaire ! Il est tout à fait légitime et important de chercher à développer des sources d’énergie plus propres, mais le réalisme impose de voir qu’il faut pour cela du temps. A suivre ici :

https://www.laselectiondujour.com/crise-energetique-en-europe-comment-en-sortir-n1653/