Il y a soixante ans, Albert Camus se tuait dans un accident de voiture. Ce fils des rivages d’Afrique du Nord, fort éloigné du christianisme, n’en avait pas moins saisi le sens profond de l’assassinat de Louis XVI. JSF
Le 21 janvier, avec le meurtre du Roi-prêtre, s’achève ce qu’on a appelé significativement la passion de Louis XVI. Certes, c’est un répugnant scandale d’avoir présenté, comme un grand moment de notre histoire, l’assassinat public d’un homme faible et bon. Cet échafaud ne marque pas un sommet, il s’en faut. Il reste au moins que, par ses attendus et ses conséquences, le jugement du roi est à la charnière de notre histoire contemporaine. Il symbolise la désacralisation de cette histoire et la désincarnation du Dieu Chrétien. Dieu, jusqu’ici, se mêlait à l’histoire par les Rois. Mais on tue son représentant historique, il n’y a plus de roi. Il n’y a donc plus qu’une apparence de Dieu relégué dans le ciel des principes.
Les révolutionnaires peuvent se réclamer de l’Evangile. En fait, ils portent au Christianisme un coup terrible, dont il ne s’est pas encore relevé. Il semble vraiment que l’exécution du Roi, suivie, on le sait, de scènes convulsives, de suicides ou de folie, s’est déroulée tout entière dans la conscience de ce qui s’accomplissait. Louis XVI semble avoir, parfois, douté de son droit divin, quoiqu’il ait refusé systématiquement tous les projets de loi qui portaient atteinte à sa foi. Mais à partir du moment où il soupçonne ou connaît son sort, il semble s’identifier, son langage le montre, à sa mission divine, pour qu’il soit bien dit que l’attentat contre sa personne vise le Roi-Christ, l’incarnation divine, et non la chair effrayée de l’homme.
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