Par Morgan Cordier
L’impétuosité de l’élan chevaleresque typiquement français s’illustre du côté de Fornovo – d’où l’expression italienne – : l’armée française étant alors en pleine déroute mais gonflée de panache, la cavalerie royale, relevant l’honneur, montre son front à l’adversaire, le culbute et cueille les fleurs de l’estime intemporelle. Cinq siècles plus tard, cette furia francese est devenue… dépressive. Mais contrairement à ce que de faux curateurs mais vrais bourreaux voudraient nous faire croire, elle n’est pas en voie de disparition. Le peuple français ressent sa décadence parce qu’il ne veut pas voir que sa vitalité lui est cachée par une société moribonde. Notre république, la Ve, « la parfaite » qui devait nous assurer la plénitude, elle, est bien moribonde. Laissons-la finir sa descente aux archives. Après un tel sentiment de perfection, le coup est rude, et même mortel, de se rendre compte que la perfection n’est pas humaine, « le chemin est toujours meilleur que l’auberge » comme l’écrivait Cervantès.
L’européen du XXIe siècle a oublié d’être moderne à force de se déclarer progressiste. Leurré par ses représentations il en a perdu la signification des mots. Il a sombré dans la tranquillité et le conservatisme de son élite. Mais la vie continue d’avancer, « nul Homme ne se baigne deux fois dans le même fleuve » nous enseigne Héraclite. Il faut ressaisir le cours vital qui nous rendra conscience de ce que nous pouvons espérer. La France est un grand pays au ralenti qui reprendra sa marche des temps emmené par son guide naturel qu’est le prince de son histoire. Notre présent doit être une tension entre le passé et le désir, caractérisée par sa souplesse et non la rigidité d’une pensée abstraite, intolérante, révérée comme idéale. Les demi-philosophes ont cassé cette souplesse qui assure la continuité nous permettant de garder un cap et des amarres. Le pèlerin connaît sa destination mais le chemin est bien jalonné d’auberges. Notre tranquillité, si chère à Madame Laurence Bloch – pilier de l’audiovisuel d’« État » –, n’est qu’une quiétude triste. Une prise de conscience touchera inévitablement les Français, attirés par l’impétueux flux vital dans lequel il doit se replonger. Le sentiment d’avoir son destin forgé par sa tradition ancrée dans son principe de l’honneur réveillera, secouera, une fierté qui parle au monde. Là, se trouve le véritable universalisme. Être Français, c’est clamer notre intimité, et non endosser un anonymat taille-unique que les « actuels » revendiquent, dans une dégoulinante inversion de sens. Retrouvons la valeur de l’honneur, l’aiguillon qui persécutera cette molle société, goûtons de nouveau la satisfaction de la contrainte, portons le corset de la dignité de nos ancêtres des siècles chevaleresques dont la mémoire imprègne encore tout Français de ses jeux d’enfant aux sages préceptes de ses anciens. La Voie capétienne nous donne le sens, chevauchons-la !


