Sur Catherine de Médicis

Un dixième texte de notre rubrique « Souvenez-vous de nos doctrines » est à retrouver aujourd’hui, de xxx

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En France, et dans la partie la plus grave de l’histoire moderne, aucune femme, si ce n’est Brunehaut ou Frédégonde, n’a plus souffert des erreurs populaires que Catherine de Médicis.

Catherine de Médicis, au contraire, a sauvé la couronne de France. Elle a maintenu l’autorité royale dans des circonstances au milieu desquelles plus d’un grand prince aurait succombé. Ayant en tête des factieux et des ambitions comme celles des Guise et de la Maison de Bourbon, des hommes comme les deux cardinaux de Lorraine et comme les deux Balafré, les deux princes, la reine Jeanne d’Albret, Henri IV, le connétable de Montmorency, Calvin, les Coligny, Théodore de Bèze, il lui a fallu déployer les plus rares qualités, les plus précieux dons de l’homme d’État, sous les feux des railleries de la presse calviniste. Voilà des faits qui, certes, sont incontestables. Aussi, pour qui creuse l’histoire du XVIe siècle en France, la figure de Catherine de Médicis apparaît-elle comme celle d’un grand roi.

Les calomnies une fois dissipées, par les faits péniblement retrouvés à travers les contradictions des pamphlets et les fausses anecdotes, tout s’explique à la gloire de cette femme extraordinaire qui n’eut aucune des faiblesses de son sexe, qui vécut chaste au milieu de la Cour la plus galante d’Europe et qui sut, malgré sa pénurie d’argent, bâtir d’admirables monuments, pour réparer les pertes que causaient les démolitions des calvinistes, qui firent à l’art autant de blessures qu’au corps politique.

Serrée entre des princes qui se disaient les héritiers de Charlemagne et une factieuse branche cadette, Catherine, obligée de combattre une hérésie près de dévorer la monarchie, sans amis, apercevant la trahison dans les chefs du parti catholique et la république dans le parti calviniste, a employé l’arme la plus dangereuse, mais la plus certaine de la politique : l’adresse.

Elle résolut de jouer successivement le parti qui voulait la ruine de la Maison de Valois, les Bourbon qui voulaient la couronne, et les Réformés, les radicaux de ce temps-là, qui rêvaient que la république impossible, comme ceux de ce temps-ci, qui cependant n’ont rien à réformer. Aussi, tant qu’elle a vécu, les Valois ont-ils gardé le trône. Il comprenait bien la valeur de cette femme, le grand de Thou, quand, en apprenant sa mort, il s’écria : « Ce n’est pas une femme, c’est la royauté qui vient de mourir ! »

Catherine avait, en effet, au plus haut degré, le sentiment de la royauté ; aussi la défendit-elle avec un courage et une persistance admirables. Les reproches font évidemment sa gloire, elle ne les a encourus qu’à cause de ses triomphes.

Pouvait-on triompher autrement que par la ruse, toute la question est là…

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