Europe relinquenda est !
Par Philippe Germain
Dans l’ombre d’un Occident-Atlantique qui s’est délité sous les coups de boutoir de Donald Trump, la France, par réflexe,semble fidèle à l’Europe, mais c’est une fidélité qui tourne son regard vers la porte. La France se détache lentement du grand mirage européen, qu’elle peine de plus en plus à reconnaître comme sien. Cette fidélité à l’idéalisme démocrate-chrétien s’essouffle, se fissure et, dans un éclat de lucidité douloureuse, se transforme en rejet. Rejet de l’Europe réelle, déconnectée des réalités.
C’est dans ce climat de malaise que les sondages de septembre 2025 viennent déposer leur vérité crue, leur verdict impitoyable. 30% des Français se disent désormais prêts à quitter l’Union européenne. 30% favorables au Frexit. 30% ! Mais ce chiffre, aussi frappant soit-il, n’est que l’écume d’une réalité plus profonde. Car cette fracture, ce rejet, est plus large, plus intense qu’on ne le croit. Il est comme une mer calme, en apparence tranquille, sous laquelle se cachent des icebergs invisibles, prêts à briser tout sur leur passage. Le pays réel, las de porter le fardeau d’un projet euro-impérialiste au profit de l’Allemagne est en train de se réveiller, de se dresser contre l’ordre technocratique.
L’étude menée sur cinq nations européennes, fait ressortir cette singularité française. Le Frexit, ce mot désormais murmuré comme une promesse de retrouver une souveraineté perdue, s’impose comme un espoir de plus en plus populaire. Ce n’est plus une idée marginale. La France, plus que toute autre nation, semble prendre au sérieux l’idée d’un retour à la liberté, à la souveraineté, loin de ce monstre bureaucratique européen. En Espagne, ils ne sont que 11% à envisager une telle issue ; en Allemagne, ils sont 22%. Mais,en France, ce chiffre atteint déjà 30%, et cela traduit bien plus qu’une simple désaffection : c’est une discordance croissante entre un peuple et l’Europe réelle… Une Europe dominée par l’Allemagne.
Ce rejet n’est pas né d’hier. Il est le fruit de décennies de frustrations, d’illusions perdues, de promesses non tenues, de sacrifices inutiles. Les Français, dans leur grande sagesse désabusée, commencent à douter de l’aptitude de l’Europe à défendre ce qui fait leur identité, à défendre ce qu’ils sont. Comment ne pas s’interroger, dans cette époque où le monde semble se déchirer à tous les coins de rue, sur la passivité de l’Europe à laquelle on demande de répondre à la fois aux défis géopolitiques et économiques ? Les interminables négociations menées par Ursula von der Leyen avec un Donald Trump qui ne semble avoir rien à faire del’Européenne décadente ont achevé de désabuser les Français. C’est une indignation amère qui se transforme en un rejet politique. Ainsi, 70% des Français, dans un cri de désespoir, réclament la démission de la présidente de la Commission européenne. Quant à 48% d’entre eux, s’ils devaient continuer à vivre sous la menace d’une Europe qui échoue, une Europe qui trahit, alors le Frexit apparaîtrait comme une solution de dernier recours, un retour à la maison, à la liberté, à la nation.
Les sondages témoignent d’un changement radical des mentalités. En mai 2025, 16% des Français se disaient « en colère » ou « inquiets » vis-à-vis de l’Europe. Ils sont plus nombreux à être animés par la crainte que par l’espoir. Et pourtant, 43% d’entre eux, encore, croient que l’Europe a des effets positifs sur leur quotidien, mais ce chiffre est en déclin constant, comme un dernier éclat des Lumières qui faiblissent. Si un référendum sur la Constitution européenne devait se tenir de nouveau, 56% des Français, en leur âme et conscience, voteraient contre. C’est plus qu’un simple rejet,c’est une rupture avec l’élite européenne, un cri silencieux qui, peut-être, n’attend que la force du vent pour faire éclater les voiles.
Et j’ajoute Europa relinquenda est et, pour cela, rejoindre le combat royaliste.


