Un premier sentiment entre effroi et consternation
Il faut toujours se fier à son premier sentiment. Celui qui saisit à la lecture le dernier opus de Jean Sévillia, Les Habits neufs du terrorisme intellectuel, se situe entre effroi et dégoût, consternation et suffocation. Il suffit en effet de feuilleter cette lumineuse démonstration pour comprendre, preuves à l’appui, que depuis un quart de siècle, la garde-robe du terrorisme intellectuel s’est considérablement étoffée. Et qu’il en va de même de l’arsenal dont il dispose, et des sévices qu’il est en mesure d’infliger à ceux qui refusent de se prosterner. En 2000, dans la première édition de son ouvrage, Sévillia avait consacré douze chapitres à des thèmes essentiellement politiques et qui, souvent, se croisaient : révolution, communisme, décolonisation… En 2025, à l’issue d’une période pourtant plus brève que celle qu’il avait traitée dans la version initiale, huit nouveaux chapitres viennent s’ajouter à l’ensemble, des chapitres qui, plus encore que les précédents, traitent de problèmes que la novlangue contemporaine n’hésiterait pas à qualifier d’« existentiels ». Ces menaces nouvelles, en effet, portent moins sur la forme du pouvoir ou la construction des mythes historiques que sur la nature de l’homme, de la famille, de la nation, de la culture et même de l’espèce. Leur nature et, au-delà, leur pérennité exigent ou impliquent leur élimination. Cette dernière est ouvertement réclamée au nom d’une idéologie plus totalitaire qu’aucune autre avant elle, puisqu’elle va encore plus loin dans la déconstruction du monde ancien et la fabrication d’un « Homme nouveau » dont elle précise avec insistance qu’il ne sera plus un homme.