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Petit traité des vertus réactionnaire

Quelques lignes d’Olivier Bardolle

Notre ami Hugues B. a exhumé pour nous ces lignes tirées de l’ouvrage d’Olivier Bardolle. Petit traité des vertus réactionnaires. 

Cela faisait longtemps… bon retour à la réalité !

… « Tant qu’à être dominé, exploité, dirigé, autant que ce soit par

d’authentiques dominants plutôt que par des escrocs du verbe. En somme, les

masses auraient tendance ces temps-ci à préférer l’original à la copie. Il

n’est pas sûr qu’elles y gagnent, mais comme elles sont devenues résolument

sceptiques, elles ne donnent jamais le pouvoir aux mêmes sur de longues

périodes, elles pratiquent l’alternance en tant que système. Un coup à

droite, un coup à gauche, comme dans le canoë, c’est la meilleure façon

d’aller droit. L’inconvénient de cette pratique, imparable en apparence,

c’est qu’elle interdit les actions à long terme et favorise le clientélisme

électoral, ce qui la rend de ce fait doublement déficiente.

En réalité, les électeurs ne croient plus beaucoup en la capacité des

politiques à améliorer les choses et considèrent que le système est en roue

libre. Tout est devenu trop compliqué, à l’ère de la mondialisation, quand

toutes les économies sont imbriquées les unes dans les autres, rendant ainsi

caduques les politiques nationales.

Et les conservateurs qui ont l’âme fataliste, sont les premiers à estimer

que plus personne n’a de prise sur les événements et que le torrent des

choses emporte tout sur son passage. C’est ainsi que s’est imposé en

quelques décennies l’idée d’une démocratie terminale, fondée sur les

réactions à chaud d’opinions sondagières et l’exhibition permanente des

stigmates du « Bien » qui doit se propager coûte que coûte à tous les

aspects, y compris les plus intimes, de la vie humaine. Nous sentons qu’il’

y a quelque chose de totalitaire là-dedans mais chacun s’y résigne et la

propagation Illuministe du « Bien » est désormais considérée comme un

moindre mal.

Plus personne ne s’offusque du déploiement en masse de caméras de

vidéo-surveillance supposé nous tenir à l’abri des multiples désordres que

la vie trimballe toujours avec elle ; clochards, poivrots, dingues,

détrousseurs, traine-savates, sans oublier surtout, celui qui justifie ce

déploiement massif : le terroriste. Pour protéger les braves gens, droite et

gauche sont désormais d’accord.

Comme le disait Nietzsche lorsqu’il annonçait l’arrivée du dernier homme : «

L’important, c’est qu’on ne leur fasse pas de mal ! » ; nous y sommes.

Lorsque Edmund Burke, en référence à Auschwitz, trouve cette formule-choc :

« pour que le mal triomphe, il suffit que les honnêtes gens ne fassent rien

» (ce qui était aussi le point de Vue d’Hannah Arendt), il n‘avait pas prévu

que la formule était diaboliquement réversible ; pour que le « Bien »

triomphe, il suffit aussi que les honnêtes gens ne fassent rien. La

passivité du troupeau, tout est là, pour le Mal comme pour le Bien.

Quand on demandait à Céline ce qu’il dirait à Dieu en arrivant au Ciel, il

répondait en parlant des hommes : « Dieu, qu’ils étaient lourds.» C’est bien

cette lourdeur accablante qui pèse de tout son poids d’inertie sur

l’évolution de la civilisation européenne, désormais  » passablement épuisée,

qui empêche l’être de décoller un tant soit peu. Pour le citoyen lambda de

nos vieilles démocraties fatiguées, ce qui importe n’est pas de « décoller »

(on n’en est plus là, la chose est entendue) mais de ne pas souffrir. Il n’a

plus qu’une obsession, sa sécurité. L’aversion pour le risque est devenue sa

principale caractéristique. Il faut absolument évacuer toute forme de risque

même au risque de rendre la vie insipide. Peu importe d’atteindre à la

grandeur, à la gloire, à l’élévation de soi pourvu que l’absence de risque

soit garantie. C’est l’idéal sécuritaire qui triomphe et nullement la quête

de la liberté, de la beauté, ou de la plus grande vitalité possible.

Et de cela, les vrais réactionnaires, et contrairement à ce qu’ont voulu

faire croire aux foules les gauchistes de toutes obédiences, s’affligent,

car les réactionnaires n’ont pas la fibre sécuritaire, bien au contraire,

ils auraient même plutôt le goût immodéré du risque, nous y reviendrons. En

fait, les deux mouvements, progressiste comme réactionnaire, ont été à

travers l’Histoire également entrepreneurs, conquérants, et fouteurs de

bordel, mais ils ne l’ont pas été pour les mêmes raisons, ni avec la même

sensibilité. Il y a toujours quelque chose de désespéré chez les

réactionnaires, ils s’engagent dans les plus folles aventures avec au cœur

l’idée de rédemption, et quand ils y vont c’est toujours un peu avec

l’esprit de sacrifice, ils ont le goût de l’action d’éclat et rêvent de

faire de leur mort une apothéose. Tandis que les progressistes, eux, y

croient réellement, naïvement même, ce sont eux les plus dangereux

évidemment car ils ne savent pas s’arrêter à temps, ils entrainent les

peuples avec eux en leur promettant un avenir merveilleux quand les

réactionnaires, qui ne croient pas au peuple, ont une perception plus

esthétique des choses et se préoccupent d’abord du salut de leur âme.

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