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«Captain Europe, la mascotte du Parlement européen qui infantilise les électeurs»

Photo publiée sur le compte Twitter du Parlement européen, accompagnée du message suivant: «Le 26 mai, dans 3 mois jour pour jour, @captain_europe votera aux élections européennes pour choisir son représentant ds l’hémicycle du Parlement européen. À l’instar de notre star, #cettefoisjevote pour l’Europe de mon choix! Et vous, pour quelle cause?» Parlement européen (Twitter)

[NDLR: le Parlement européen a précisé jeudi soir que la photo de Captain Europe, relayée sur son compte Twitter officiel le 26 février, est «une initiative individuelle et indépendante de la campagne de mobilisation du Parlement européen».]

FIGAROVOX.- Il vient de faire un retour triomphal: Captain Europe est réapparu sur Twitter, à quelques mois des élections européennes, pour encourager les citoyens à se rendre aux urnes. Au risque de frôler le ridicule?

David DESGOUILLES.- Pourquoi frôler? L’infantilisation des électeurs est à son comble. Dernièrement, on avait eu droit aussi des «eurolapins», des personnages tout aussi ridicules, dans une campagne censément humoristique, aux prises avec des loups se prénommant Vladimir, Ping et Donald. On pourrait croire que ce genre de campagne vient contrebalancer l’habituelle dramatisation à grand renfort de points Godwin, que Mme Loiseau a illustrée récemment en utilisant l’anniversaire de la libération du camp d’Auchwitz pour fustiger les eurosceptiques. Mais il n’en est rien. Cela procède exactement du même postulat: l’électeur en général, et celui qui se méfie de l’UE en particulier, est un enfant qu’il faut éduquer par tous les moyens, qu’ils soient outranciers ou ridicules. En tout cas si des souverainistes se laissaient aller à de telles mises en scène, qu’est-ce qu’on entendrait: populisme, trumpisation etc. Et on aurait raison!

En 2014, seuls 42 % des Européens s’étaient rendus aux urnes pour élire les eurodéputés. Quels sont les ressorts d’une telle abstention?

Il y a des raisons structurelles. La fiction d’un Parlement européen représentant un peuple européen – qui n’existe pas – ne convainc pas grand monde. Il n’y a pas d’espace démocratique européen, ni de vie politique européenne car il n’y a pas de peuple européen mais des peuples européens, avec des vies politiques nationales et des espaces démocratiques nationaux. De plus, même si le traité de Lisbonne a accru ses pouvoirs, le Parlement européen est loin d’avoir le rôle le plus important dans le processus de décision et les électeurs le savent bien. Et cela ne signifie pas que les électeurs ne s’intéressent pas à la question européenne. En France, par exemple, la participation aux référendums de 1992 et 2005 était très forte. Car l’enjeu y était perçu, à juste titre, comme beaucoup plus important.

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